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Elle représente Churchill, Roosevelt et Staline au moment de l'ouverture de la Conférence de Yalta le 4 février 1945
Le sujet
La conférence de Yalta est une réunion des responsables en charge de l'Union soviétique (Joseph Staline), du Royaume-Uni (Winston Churchill) et des États-Unis (Franklin D. Roosevelt). Elle s'est tenue du 4 au 11 février 1945 dans le palais de Livadia, aux environs de la station balnéaire de Yalta en Crimée.
Elle a été préparée par la conférence de Malte du 31 janvier au 3 février 1945, où les Alliés se sont concertés pour présenter un front uni à Staline sur la planification de la campagne finale contre les troupes allemandes et japonaises et sur la limitation de la progression de l'Armée rouge en Europe centrale.
Quand commence la conférence de Yalta, l'Armée rouge de l'URSS a déjà atteint l'Allemagne orientale et ne se trouve plus qu'à une centaine de kilomètres de Berlin, ce qui donne à Staline une position d'autant plus forte dans la négociation qui s'amorce. Les Anglo-Saxons, quant à eux, n'ont pas encore franchi le Rhin. L'assurance dont fait preuve Staline face à ses alliés occidentaux est d'autant plus grande que Roosevelt est malade (il meurt trois mois plus tard) et que Churchill est physiquement usé. Par ailleurs, Roosevelt affiche une méconnaissance totale des"valeurs morales" de Staline en affirmant : « Si je lui donne tout ce qu'il me sera possible de donner sans rien réclamer en échange, noblesse oblige, il ne tentera pas d'annexer quoi que ce soit et travaillera à bâtir un monde de démocratie et de paix. »
Officiellement les buts de la conférence de Yalta sont les suivants :
- adopter une stratégie commune afin de hâter la fin de la Seconde Guerre mondiale ;
- régler le sort de l’Europe après la défaite du Troisième Reich ;
- garantir la stabilité du nouvel ordre mondial après la victoire.
A ces fins, les trois chefs alliés projettent de démilitariser l'Allemagne et de la découper en trois zones d'occupation. Ils se proposent aussi de réunir une conférence internationale en vue de remplacer la défunte Société des Nations (SDN) dont le siège est à Genève. Elle sera remplacée par l'ONU (Organisation des Nations Unies).
Churchill plaide pour qu'en plus des Trois Grands (États-Unis, Royaume-Uni, URSS), la France et la Chine disposent aussi d'un siège permanent à la tête de la future institution. L'hostilité est générale mais il finit par obtenir gain de cause plus tard a la Conférence de Postdam et obtient une quatrième zone d'occupation de l'Allemagne par la France.
Il n'est evidemment pas question de contester à l'URSS les territoires qu'elle a déjà annexés ou qu'elle s'apprête à annexer. C'est ainsi que l'URSS conserve de fait, les États baltes, la Moldavie, la Carélie, la Pologne orientale et même la Prusse orientale.
En ce qui concerne les pays européens libérés de la tutelle nazie, les «Trois Grands» s'engagent à les laisser libres de choisir leur destin.
Contrairement à une légende postérieure, il n'a jamais été question d'un «partage» de l'Europe au cours de la conférence de Yalta. Par contre, il est vrai que Roosevelt se soit laissé abuser par la bonhomie de Staline. Il ne lui faut que quelques semaines pour constater en Pologne et ailleurs le peu de crédit de ses promesses.
L'objectif principal de Staline reste bien de confirmer les résultats de la conférence interalliée de Moscou du 9 octobre 1944 esquissant un plan de partage de l'Europe du Sud-Est en « zones d'influence » pour l'après-guerre. Ce sont ces résultats qui, ajoutés à ceux de la seconde conférence de Québec, débouchent sur la « guerre froide ». La version officielle soviétique, après guerre, est fondée sur le souci de « préserver l'Union soviétique de futures attaques, comme en 1914 et en 1941, en la protégeant par un glacis territorial et politique ». Dans ce but, la diplomatie soviétique œuvre, pour commencer, à la création d’une Pologne dirigée par un gouvernement ami de l’Union soviétique.
Churchill et Roosevelt, de leur côté, cherchent à obtenir de Staline la promesse que l'Union soviétique entre en guerre contre le Japon dans les trois mois après la capitulation de l’Allemagne et tous deux sont prêts, pour cela, à faire des concessions.
Les accords conclus à l'issue de la Conférence de Yalta prévoient :
- des élections libres dans les États européens libérés, les trois alliés s'engageant à « constituer des autorités gouvernementales provisoires largement représentatives de tous les éléments démocratiques des populations et qui s'engageront à établir, dès que possible, par des élections libres, des gouvernements qui soient l'expression de la volonté des peuples »
- l'organisation en avril 1945 de la conférence de San Francisco ;
- l’entrée en guerre de l'Union soviétique contre le Japon dans les trois mois qui suivent la défaite de l'Allemagne, l'URSS recevant en échange le sud de l’île de Sakhaline et les îles Kouriles ;
- la destruction du militarisme allemand et du nazisme ;
- la division de l'Allemagne en trois zones occupées par les trois vainqueurs : États-Unis, URSS, Royaume-Uni (Churchill obtenant, peu après la conférence de Potsdam, une 4eme zones d'occupation revenant à la France ;
- le déplacement de la Pologne vers l'ouest : elle cède des territoires à l'URSS et reçoit en compensation des territoires enlevés à l'Allemagne ;
- l'établissement de la frontière soviéto-polonaise sur la ligne du pacte germano-soviétique de 1939 (correspondant en partie à la ligne Curzon) ;
- la réorganisation du « Comité de Lublin », gouvernement pro-soviétique établi en Pologne libérée, « suivant des bases démocratiques plus étendues, avec l'inclusion des chefs démocrates se trouvant à l'étranger », c'est-à-dire des membres du gouvernement polonais en exil à Londres ;
- le fonctionnement futur de l'ONU, dont la création a été décidée en 1944 à la conférence de Dumbarton Oaks : le droit de veto des membres permanents du Conseil de sécurité jouera pour tous les cas sauf pour les questions de procédure ; l’URSS demande autant de sièges qu'elle compte de provinces et de régions (soit 16), mais en obtient « seulement » trois (Russie, Ukraine, Biélorussie) ; les Nations unies auront un droit de regard sur l'organisation de l'Europe.