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Maitre de la Ratière, La bataille de Marignan, miniature, c. 1515, Musée Condé de Chantilly, France |
S'il est une date de l'Histoire de France qui n'est pas ignorée c'est bien celle là, Marignan : 1515 !!! Par contre peu se souvienne que c 'est le 13 septembre 1515 précisément, le lendemain de ses 21 ans, et 8 mois seulement après avoir été couronné roi de France, que François 1er à la tête d'une armée de 300.000 hommes, écrase les Suisses dans la plaine du Pô, à Marignan...
Dès son avènement, le but de François 1er, est de reprendre la conquête de l'Italie, entamée par ses prédécesseurs Charles VIII et Louis XII, à commencer par celle du duché de Milan, qu'il revendique comme étant l'héritage de son arrière-grand-mère Valentine Visconti, épouse de Louis d'Orléans.
Pour mener a bien cette ambition, le nouveau et fringuant roi de France a le soutien de toute la noblesse française, jeune et fougueuse comme lui et avide de combats et de gloire chevaleresque, avec des chefs aussi prestigieux que le Connétable de Bourbon, La Trémoille, La Palice et bien entendu le légendaire chevalier Bayard
" sans peur et sans reproches" .
Partant de Lyon à la fin du mois d'août 1515, en quelques jours, François 1er, fait franchir les Alpes à son impressionnante armée par le col de Larches (ou col de l'Argentière) et déboule dans la plaine du Pô ou personne ne l' attendait aussi tôt... ni à cet endroit puisque les 20.000 Suisses des milices à la solde de Massimiliano Sforza, duc de Milan et du pape Léon X, les attendaient aux cols de Suse et de Pignerol. C'est un exploit d'autant plus remarquable pour l'époque que l'imposante armée de François 1er franchit les cols avec un sur-équipement de quelques 120 pièces d'artillerie lourde. Il faut préciser que l’artillerie française est à cette époque la première artillerie d’Europe.
Fort de cette réelle puissance de feu, le roi établit son camp à Marignan, à quelques kilomètres au sud de Milan alors que les Vénitiens, alliés des Français, campent à Lodi.
Les adversaires font alors mine de négocier. Le roi pense un moment avoir satisfaction sans combattre mais brusquement le 13 septembre, les Milanais sortent de la ville et enfoncent l’armée royale. Le plus gros de leurs troupes est formé de la meilleure infanterie du monde, celle des mercenaires Suisses. Ces derniers attaquent les lansquenets qui protègent l'artillerie. Les trois carrés de piquiers (7 000 à 8 000 hommes par carré) les font plier mais le roi vient les soutenir avec audace à la tête de 200 hommes. Épuisés, les combattants luttent jusqu'à la nuit tombée et ne cessent le combat que lorsque la pleine lune disparaît derrière les nuages. Ils s'endorment sur place.
Bayard se bat avec une grande bravoure. Son cheval est tué sous lui. Il se remet en selle aussitôt ; les brides sectionnées, sa seconde monture s'emballe et l'entraîne vers les rangs suisses. Mais il se sauve à temps et regagne son camp à travers les vignes.
Au petit matin du 14, le combat reprend. L'artillerie française commandée par le sénéchal d'Armagnac fait des ravages mais l'aile gauche de l'armée du roi commandée par le duc d'Alençon, fléchit. Dans le même temps, à Villafranca, le fougueux Pierre de Terrail, seigneur de Bayard surprend en plein déjeuner le prince Prosper Colonna, bras droit du duc de Milan, et le capture. Sur le champs de bataille, l'arrivée inespérée des renforts vénitiens alliés des Français a raison des Suisses et transforme la bataille en un succès total.
Dans l'apres midi du 14 Septembre, les français et leur alliés quittent le champ de bataille de Marignan, abandonnant 20 000 morts et prisonniers dont 14 000 Suisses. En une vingtaine d'heures, la bataille de Marignan fait un total d'au moins 16 000 morts. C'est encore plus qu'à Azincourt, un siècle plus tôt... Du jamais vu en Occident depuis la fin de l'Antiquité, ce qui a fait dire à nombres d'historiens que la bataille de Marignan fut la préfiguration des hécatombes de l'ère moderne.
A la fin de la bataille, et à même le champ de bataille, selon une ancienne coutume féodale romanesque, le roi François Ier est adoubé chevalier par Pierre du Terrail, seigneur de Bayard.
Ce geste symbolique, resté dans les mémoires de tous, participera grandement à la légende chevaleresques des deux hommes.
A ce moment précis, le Milanais est reconquis. La ligue des princes italiens se défait, les négociations commencent.
L'année suivante, à Bologne, le pape Léon X accepte un concordat qui règle les affaires de l’Eglise de France : le roi seul a autorité pour désigner les évêques et les abbés dans son royaume. De surcroit, le pape reconnait François 1er comme duc de Milan, de Parme et de Plaisance donnant corps a ses ambitions de conquête italienne.
La bataille de Marignan, à l'aube du règne de François Ier, devient un symbole de la gloire du roi.
La défaite des Suisses fut elle aussi, un événement majeure du 16e siècle : leur réputation d'invincibilité avait cédé aux français. Elle a pour conséquence une" paix perpétuelle" dans laquelle les Suisses se mettent même au service des rois de France jusqu'à la Révolution française... et au delà même puisque cette paix ne s'est jamais trouvée rompue depuis 1515.
Blog de Jean-Jacques Handali