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Portrait de Jean-Francois Champollion par Leon Coignet, 1831, Musée du Louvre Paris |
A peu près tout un chacun sait que Jean-François Champollion (1790-1832) a découvert le sens de l'écriture hiéroglyphique, qui parsème les tombes et monuments de l'Egypte pharaonique.
Peu de gens par contre savent qu'il ne s'était jamais rendu en Egypte pour cela, mais que cette découverte majeure qui fait de lui le père d'une nouvelle science l'Egyptologie
, s'est faite dans son bureau à la lueur d'une bougie.
Ce que l'on sait moins aussi c'est que cette découverte a probablement eu raison de santé physique et psychique et qu'elle pourrait être responsable de son décès précoce à l'âge de 41 ans.
Ce n'est que 4 ans avant sa mort que Jean-François Champollion se rendra pour la première fois en Egypte, chargé par le roi Charles X d'une mission scientifique au cours de laquelle il recueille de nombreuses données et objets pour vérifier que son système hiéroglyphique fonctionne bien. Auparavant, nommé conservateur c
hargé des collections égyptiennes au musée du Louvre en 1826, il avait déjà convaincu le roi de France d'acheter la collection d'Henry Salt, consul britannique en Égypte, et de faire d'autres acquisitions majeures, dont la plus célèbre est celle de l'obélisque de Louxor, qui est couché en août 1834 sur le quai du Cours-la-Reine avant d'être dressé à Paris, sur la place de la Concorde, le 25 octobre 1836.
Sa passion de l'Egypte antique lui faisait dire de lui même :
" Je suis tout à l'Égypte, elle est tout pour moi ".
Lorsque des soldats français découvrent 1798 à Rosette, dans le delta du Nil, une pierre noire gravée de trois textes dont l'un en grec ancien, un autre en démotique, une écriture égyptienne tardive, et le troisième en hiéroglyphes, Jean François Champollion n'a que 8 ans !
Il est alors loin d'imaginer que cette
pierre de Rosette va être l'instrument principal de sa découverte par l'étude comparée de diverses traductions d'un même texte qu'elle permet. D'autant que la pierre de Rosette, interceptée en mer par un navire britannique, n'arriva jamais en France mais pris immédiatement la direction du British Museum à Londres !
C'est à lâge de 18 ans, en 1808, alors qu'i poursuit ses études en langues orientales auprès du Collège de France, qu'un de ses camarades lui annonce la découverte par l'archéologue Alexandre Lenoir d'un déchiffrement complet des hiéroglyphes égyptiens. Bien que cette publication soit fantasque, et que tout le monde scientifique d'alors le sache, cela décide Champollion à faire porter une partie de ses études sur le déchiffrement des hiéroglyphes.
Grâce à un collectionneur, l’abbé de Tersan, il parvient à se procurer une copie de la pierre de Rosette, toujours détenue à Londres, mais préfère étudier les hiéroglyphes d’abord des papyrus en écritures cursives. Dès 1808, il découvre le principe de
ligatures des signes (regroupement de signes
). Fort de cette découverte, il nommé l'année suivante, à l'âge de 19 ans, professeur adjoint d'histoire à l'université de Grenoble... ce qui reste à ce jour inédit dans l'Histoire de l'enseignement !
Dans le même temps, un Anglais de quinze ans son aîné, Thomas Young déchiffre la version démotique de la
pierre de Rosette et découvre que les cartouches e contiennent les noms de divers pharaons. Jean-François Champollion intègre cette information mais va plus loin en observant que le texte hiéroglyphique contient trois fois plus de signes que le texte grec ne compte de mots. Il en déduit que les hiéroglyphes (on en recense environ 5 000) ne sont pas seulement des idéogrammes, mais peuvent aussi, dans un même texte, servir de signe phonétique comme nos lettres de l'alphabet.
À partir de 1821, il déchiffre les premiers cartouches royaux : le premier à être découvert est celui de Ptolémée V (sur la copie de la pierre de Rosette), puis celui de Cléopâtre sur la base d'un obélisque et sur un papyrus bilingue.
L’architecte Jean-Nicolas Huyot, lui ayant envoyé des reproductions de détails des temples d'Abou Simbel qui venaient d'être découverts, Champollion y repère dans un cartouche le signe solaire de Râ (Rê),. Idem pour ThôtMS, Thoutmôsis... Si bien que le 14 septembre 1822, il peut lire clairement les noms égyptiens et s'exclamer
« Je tiens mon affaire » avant sombrer dans un coma de quelques jours sans doute du à l'épuisement !
Ce déchiffrement signe l'acte de naissance d'une nouvelle science : l'égyptologie.
Le 27 septembre 1822, Jean François Champollion écrit une lettre à l
'Académie des Inscriptions et des Belles Lettres, relative à l'
alphabet des hiéroglyphes phonétiques et dévoile en ces terme sa découverte d'un système de déchiffrement des hiéroglyphes :
« C'est un système complexe, une écriture tout à la fois figurative, symbolique et phonétique, dans un même texte, une même phrase, je dirais presque dans un même mot. »
Il faudra encore deux ans à Champollion pour publier son
Précis du système hiéroglyphique des anciens Égyptiens
En 1831, il donne sa leçon inaugurale au College de France où il obtient la chaire d'Antiquité égyptienne après avoir été élu à l'Académie des inscriptions et belles-lettres.
L'année suivante, il meurt à Paris le 4 mars 1832, à l'âge de 41 ans. La cause exacte de sa mort n'est pas connue (diabète, parasitose contractée en Égypte, pendant son unique voyage tardif, choléra ?)..., son frère ayant refusé l'autopsie.
Le 24 avril 1833, une loi ordonne d'acquérir "au nom de l'État et dans l'intérêt des sciences" les manuscrits, les dessins et les livres de Jean-François Champollion.
Blog de Jean-Jacques Handali