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Les bourgeois de Lyon demandant protection à un représentant du roi de France en 1271- Détail d'une enluminure |
A l'époque romaine, Lyon
(Lugdunum en latin) était la capitale des Gaules et le siège du Primat des Gaules, autrement dit du chef de l'Église gallicane, aux premiers temps de la chrétienté. Ce titre honorifique fut d'ailleurs confirmé par le pape Grégoire VII à son archevêque au XIe siècle et tous ses successeurs jusqu'à aujourd'hui le portent encore.
Malgré cette appartenance de longue date au monde Romain et Franc, à la fin du IXe siècle, à la faveur des partages de l'empire de Charlemagne, Lyon entre dans le giron du Saint Empire Romain Germanique. C'est au moment du partage de l'empire carolingien, que Lyon et sa région furent intégrés dans la
Francie médiane appelée aussi
Lotharingie, comme toute la vaste région qui s'étendait du Jura à la Méditerranée, et des sommets alpins au Rhône et à la Saône. Cette région, devenue royaume de Bourgogne Provence, fut léguée par son dernier souverain au titulaire du Saint Empire le 6 septembre 1032. C'est ainsi que Lyon et le Lyonnais deviennent terre d'Empire et que la frontière du Saint Empire va se trouver peut à peu déplacée jusqu'à Avignon, le célèbre pont à péage de la chanson, assurant le passage entre le royaume de France est les terres du Saint Empire.
Au confluent du Rhône et de la Saône, entre Méditerranée, Jura et Forez, la cité de Lyon incluse dans le Saint Empire est ainsi promise à un opulent avenir du notamment au développement des échanges commerciaux. Sa situation, à cheval sur le Saint Empire et le royaume capétien, loin des centres de pouvoir, lui permet d'acquérir une très grande indépendance et d'échapper à la convoitise des grands barons féodaux.
C'est seulement à la fin du Moyen Âge que l'opulente cité entre pour de bon dans la mouvance française. Elle n'y a pas trop de mal, ses habitants parlant un dialecte roman plus proche du français de Paris (la langue d'oïl) que de l'allemand d'outre-Rhin.
En 1245, le pape Innocent IV y réunit un grand concile universel au terme duquel, le 17 juillet 1245, il prononce la déposition de l'empereur Frédéric II de Hohenstaufen. C'est le dernier acte de la
querelle des Investitures, qui a opposé pendant deux siècles les papes et les empereurs.
Soucieux de leur sécurité, le pape et les cardinaux de la curie (le gouvernement pontifical) ne quittent Lyon qu'en avril 1251. Pendant six ans donc, la ville, grâce à sa situation frontalière, devient le siège de la chrétienté occidentale.
Cette crise institutionnelle va favoriser la mainmise progressive du roi de France sur Lyon. Le Saint-Siège, à son corps défendant, y concourt en rappelant régulièrement que la ville n'est pas seulement une terre d'Empire mais aussi la «métropole des Gaules».
La situation se tend encore un peu plus avec le roi Philippe le Bel.
Pionnier de la séparation de l'Église et de l'État, il conteste au pape Boniface VIII le droit d'intervenir dans ses affaires, ce qui vaut à ce souverain pontife d'être, dit-on, giflé à Anagni par le conseiller du roi. Très secoué par ce geste sacrilège, il meurt peu après.
Pour assurer sa tranquillité, Philippe le Bel en profite pour pousser le conclave à élire un pape français. C'est Bertrand de Got, qui est couronner... à Lyon, le 1er novembre 1305, sous le nom de Clément V. Dès lors, le roi va pouvoir avancer ses pions et il ne va pas se priver de le faire.
En 1312, comme l'archevêque de Lyon refuse de prêter serment au roi de France et d'obéir à ses officiers, Philippe le Bel envoie contre lui une armée sous le commandement de son fils Louis, futur Louis X le Hutin. Le 10 avril, après un siège de trois mois, l'archevêque se soumet et transmet ses pouvoirs civils et judiciaires au roi.
La ville reçoit du roi une charte communale. La bourgeoisie va dès lors s'enrichir et prospérer du fait d'une situation exceptionnelle au croisement des routes vers le bassin parisien, les Flandres, l'Italie et la Rhénanie. Ses foires et ses établissements bancaires vont devenir parmi les plus réputés d'Europe et rivaliser avec sa voisine Genève.
Les historiens ont coutume de fixer ce moment crucial à la date du 10 avril 1312. Ce jour-là, dans une déclaration solennelle, l'archevêque Pierre de Savoie transmet officiellement au roi Philippe IV le Bel tous ses pouvoirs judiciaires et politiques sur la ville et le Lyonnais.
Blog de Jean-Jacques Handali